Epicerie anti-gaspi et collectif « Les Gueules Cassées » en anticipation par rapport aux mesures de lutte contre le gaspillage.

Epicerie Ethique et Responsable Qualité - Réglementation - production 10/12/2015

Alors que se tient la COP 21, l’Assemblée nationale vient de voter à l’unanimité un ensemble de mesures de lutte contre le gaspillage alimentaire. Mesures qui vont dans le sens des initiatives issues du collectif « Les Gueules Cassées » en France ou de l’émergence d’épiceries anti-gaspi comme Daily Table à Boston.

 

Considéré comme un enjeu crucial pour la planète, le gaspillage alimentaire représenterait chaque année en France l’équivalent de « 56 repas par foyer« . Les écologistes relèvent même que « s’il était un pays, le gaspillage alimentaire serait le troisième pollueur mondial ».

Le texte voté mercredi soir par l’Assemblée nationale sera présenté au Sénat début 2016 en vue d’une rapide adoption définitive et devrait ainsi permettre de « bâtir un cadre légal contre le gaspillage« .

 

 

Cette proposition de loi hiérarchise les actions à mettre en place par chaque acteur de la chaîne alimentaire, à la fois pour prévenir le gaspillage mais également pour favoriser l’utilisation des invendus pour la consommation humaine, pour l’alimentation animale, à des fins de compost pour l’agriculture ou de valorisation énergétique.

Parmi les dispositions prises par le texte, l’une vise à interdire aux grandes surfaces de jeter les invendus, de détruire de la nourriture consommable, destruction habituellement réalisée par javellisation. La GMS aura l’obligation de signer un protocole avec une association de solidarité afin de faciliter les dons alimentaires.

Ce texte vient donc conforter les initiatives déjà bien engagées de certains acteurs de la distribution, en France comme à l’étranger.

 

Le logo de la pomme cabossée repris par Carrefour pour sa nouvelle marque « Tous Antigaspi ».

Les distributeurs n’ont pas attendu l’adoption définitive du texte et ont déjà pris les devants, ne pouvant actuellement faire abstraction du phénomène anti-gaspi.

antigaspi5Certains ont choisi de lancer leur propre filière comme Intermarché, pionnier en 2014 avec ses « fruits et légumes moches ». Les Mousquetaires déploient aujourd’hui des biscuits moches ainsi que des conserves moches, boîtes de légumes ou plats cuisinés, prévues en linéaires en 2016.

D’autres ont préféré s’associer aux Gueules Cassées, avec l’avantage de bénéficier de l’image reconnue et valorisante du collectif : alors que Leclerc, Casino ou Franprix ont conservé le logo et le nom du collectif « Les Gueules Cassées« , Monoprix et sa marque « Quoi ma gueule« , et Carrefour aujourd’hui, ont souhaité personnaliser leur démarche. En effet, à partir de janvier 2016, Carrefour lance sa marque « Tous Antigaspi » avec des céréales pour petit déjeuner présentant de légers défauts d’aspect.

 

Le logo de pomme cabossée constitue aujourd’hui un repère et a été étendu hors de nos frontières avec au total 21 pays ayant déjà fait des demandes auprès des Gueules Cassées :

  • « Ugly Mugs » aux Etats-Unis ou au Royaume-Uni,
  • « Die Hässlichen » en Allemagne
  • « Brutti Musi » en Italie…

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Alors qu’en France fleurissent les initiatives sur le modèle des « Gueules Cassées », un modèle d’épicerie anti-gaspi est né à Boston.

antigaspi1Depuis juin 2015, Doug Rauch, l’ancien président de Trader Joe’s, a ouvert une épicerie anti-gaspi à Boston. « Daily Table » propose ainsi des produits de qualité à des prix abordables et compte venir concurrencer les fast-foods avec un positionnement prix équivalent à celui de la « junk food ».

 

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L’enseigne fait le pari de proposer des produits sains, goûteux pour tous et non plus seulement à destination des plus aisés : des produits invendus ou invendables faute de standardisation sont récupérés au lieu d’être jetés, à la fois auprès d’agriculteurs ou de distributeurs. Certains produits sont revendus dans leur packaging actuel à un prix plus attractif, d’autres (poisson, viande etc.) sont cuisinés pour être revendus en plats cuisinés.

 

Doug Rauch explique que « des chefs préparent des salades, soupes, entrées et autres mets prêts à être emportés, pour un coût inférieur à 2 dollars », vendus dans un cadre ressemblant à la plupart des supermarchés afin de ne pas stigmatiser les clients.

 

 

Le fondateur ajoute que son magasin prépare des repas car, faute de temps, « 80% des américains ne savent pas encore à 16h ce qu’ils vont diner quelques heures après ».

Une difficulté pour Daily Table est d’être soumis aux réapprovisionnements aléatoires de ses partenaires, nécessitant de la part des chefs une grande adaptabilité, comme dans « un concours Top Chef », raconte le fondateur.

Daily Table accueille déjà un millier de clients par jour et annonce, via son site, que de nouvelles épiceries devraient ouvrir dans les mois à venir dans la région de Boston et partout aux Etats-Unis. 

Cette initiative, même si elle a la volonté d’être rentable permet avant tout de limiter un des excès de notre société de consommation et de le mettre au profit de ceux qui en ont besoin, sans pour autant rentrer dans une logique d’assistanat.

La réglementation française permettrait-elle de faire émerger de telles initiatives dans l’Hexagone ? A suivre compte tenu des nouvelles dispositions votées par l’assemblée nationale…

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